Gangster

Boardwalk Empire

Boardwalk Empire, série se déroulant à Atlantic City et produite par Mark Wahlberg, est certainement l’une des meilleures séries des années 2010.

Le scénario de Boardwalk Empire

Le spectateur suit le quotidien de Nucky Thompson, trésorier de la ville d’Atlantic City, de la proclamation de la prohibition aux débuts des années 30. Nucky est un gangster, mais un gangster honorable. Il donne du travail aux gens, offre des cadeaux, distribue les pots-de-vin et fait du trafic d’alcool.

La première saison se focalise autant sur son trafic d’alcool que sur son histoire d’amour naissante avec Margaret Schroeder, une Irlandaise malheureuse en ménage. On découvre aussi ses acolytes, en particulier Chalky White, Jimmy Darmodi, son frère Elias et son majordome Eddie Kessler.

Les ennemis sont nombreux et non des moindres, notamment l’agent Van Alden, qui entend lutter contre le trafic d’alcool et faire respecter la prohibition.

Un tableau vivant et fidèle de la mafia

L’une des raisons du succès de Boardwalk Empire tient à sa documentation très fidèle. Certaines scènes, reproduites dans la série, se sont réellement passées. Ainsi, les parrains de la pègre de l’époque se sont vraiment retrouvés pour faire la paix, à Atlantic City, sous la supervision de Nucky Johnson, celui qui a inspiré Terence Winter.

Atlantic City a connu ses plus grandes heures de gloire durant la prohibition, en raison d’une convergence d’évènements. Le génie de Johnson et de son prédécesseur, le Comodor, a été de comprendre que la petite classe moyenne et la classe moyenne tout court, devait aussi avoir accès aux loisirs, que la plage et les salles de jeux ne devaient plus être réservés à une élite très fortunés. Bien entendu, ils n’ont pas dédaigné cette clientèle. Mais, ils ont fait de la place pour les autres.

Dans la série, vous verrez notamment des tractations autour de routes d’accès vers Atlantic City. Jusqu’au début du XXe siècle, il n’y avait même pas de route bitumées ni de trains. Le Comodor et Johnson ont modernisé les infrastructures pour accueillir les touristes. Bien que la ségrégation raciale n’ait pas épargné le nord des États-Unis, Boardwalk Empire montre qu’elle n’était pas aussi violente dans cette ville qu’ailleurs. Johnson avait compris que les Noirs aussi avait une classe moyenne. Pour autant, les moments où Johnson/Thompson naviguent entre la communauté Afro-Américaine et le KKK sont assez réalistes. N’importe quel politicien américain de l’époque était obligé d’un racisme bon teint pour rester en poste.

Une foule de détails

Chaque détail est extrêmement soigné et bien travaillé. On a vu les aspects purement historiques, même s’il ne s’agit pas d’un documentaire, on pourrait parler des personnages de la pègre et de leur amitié. Ainsi, Lucky Luciano et Meyer Lansky étaient réellement amis dans la vie. Lorsque Meyer raconte comment il est devenu, durant l’enfance, ami avec Lucky, l’histoire est véridique et raconté par les deux, dans leurs biographies respectives.

Tout comme la guerre sanglante qui a opposé plusieurs clans de la mafia italienne et qui vaudra à Lucky son oeil qui dit zut à l’autre, les investissements de Lansky en Floride ou encore les tractations du Parti républicain. Vous apprécierez aussi l’attention portée aux costumes, aux coiffures, aux voitures, bref un tableau d’ensemble absolument fabuleux.

La période durant laquelle se passe l’action correspond à un âge d’or pour l’Amérique, bien avant le krach de Wall Street, la montée du fascisme en Europe et la Seconde Guerre mondiale. Par contre, vous verrez quelques rappels de la boucherie qu’a été la Première Guerre mondiale et l’inutilité de cette guerre, même si cet axe est beaucoup plus développé dans Peaky Blinders, pour des raisons évidentes.

Une série profondément politique

Au risque de surprendre, si vous cherchez une bonne série politique, Boardwalk Empire peut vous satisfaire. Dit ainsi, cela peut paraître curieux. Nucky sait comment gagner une élection, aussi bien chez les Blancs que chez les Noirs.

Comment ? En répondant à leurs besoins primaires. Il donne du travail à ceux qui en ont besoin, ils paient les frais médicaux, ils offrent des dindes pour Thanksgiving, etc. Bien entendu, il y a une gigantesque part de corruption. Néanmoins, le « vrai » Nucky Johnson a usé des mêmes procédés et cela a fonctionné durant un certain temps. En fait, jusqu’à être rattrapé par la justice, sinon, ç’aurait pu durer encore très longtemps.

Nucky sait afficher un air qui donne l’impression à son interlocuteur, qui vient lui demander quelque chose, qu’il se sent concerné par son problème, qu’il est à l’écoute, qu’il a de l’empathie. Donc, quand le monsieur qui est gentil avec tout le monde, dit « votez Républicains ! », bien sûr que les gens l’écoutent et vont voter Républicains. Parce qu’ils se disent « si M. Thompson, qui est si bon avec nous, nous dit de voter ainsi, c’est qu’il doit savoir et que ce sont ses amis, donc on a tout à y gagner ». Quelque part, la série est une glorification de la politique de terrain.

Un chef-d’œuvre

Boardwalk Empire est une production HBO, intégrée dans le catalogue de la plateforme de streaming Max, en version française et originale. Néanmoins, si vous avez un réel coup de coeur pour cette série, on vous recommande d’acheter l’intégrale. L’histoire est tellement riche que vous découvrirez de nouveaux détails à chaque visionnage.

Elle ne se démodera pas non plus. Elle fait cinq saisons de douze épisodes, sauf la dernière saison qui n’en compte que huit. Vous passerez un excellent moment, vous apprendrez des choses et en regardant le dernier épisode, vous n’aurez qu’une envie : en savoir plus.

Dès lors, on conseillera trois ouvrages. Le premier est l’autobiographie de Lucky Luciano. Techniquement, ce n’est pas une autobiographie, mais vous comprendrez en lisant le livre. Vous aurez l’impression d’être assis face à lui, dans un canapé en cuir, un whisky sur la table basse. Le deuxième livre est celui consacré à Meyer Lansky. Un peu moins bien écrit mais, tout aussi passionnant. Le troisième est évidemment le livre qui a donné naissance à Boardwalk Empire.

Enfin, point bonus : les personnages féminins ne sont pas insupportables, ce qui est un des écueils des films et séries avec des gangsters. Vous comprendrez pourquoi cette série a été inondée par les récompenses.