Comédie

Shameless

Véritable pépite qui nous vient du Royaume-Uni, Shameless a été adaptée pour le marché américain. Si vous voulez comprendre une partie des Américains, vous devez la regarder. Attention : cette chronique révèle des éléments-clefs de l’intrigue.

Le scénario de Shameless

Les Gallagher vivent dans les quartiers sud de Chicago. La mère, Monica, s’est tirée, laissant derrière elle six enfants et un mari, Franck, totalement irresponsable.

La charge de parent revient de facto à Fiona, l’aînée, qui a dû interrompre sa scolarité pour élever toute la fratrie et payer les factures.

Heureusement, elle peut compter sur l’aide de ses voisins, Kevin et Veronica, qui viennent souvent lui prêter main-forte.

Cette famille pas ordinaire va devoir composer avec la toxicomanie et l’alcoolisme de Franck, la maladie mentale, la parentalité trop précoce, les ennuis judiciaires et la gentrification à marche forcée de leur quartier, qui va les pousser dehors.

Une série profondément politique

On peut regarder Shameless de deux façons. On peut y voir une série comique, sur les galères du quotidien, ce qu’elle est, même si elle n’est pas dépourvue de moments assez émouvants. Ou la voir comme un portrait d’une Amérique oubliée.

Les Gallagher sont l’archétype des Blancs de la classe ouvrière, qui ont été laissés de côté et qui n’intéressent jamais les politiques. L’un des points intéressants est que la série commence sous le mandat d’Obama et se poursuit jusqu’à l’épidémie de COVID, sous le premier mandat de Donald Trump.

En dehors de quelques petites touches ici et là, le changement de président n’a aucun impact sur eux. Ils sont toujours pauvres, ils accumulent toujours les galères et ils doivent toujours se débrouiller par eux-mêmes, car, ils sont systématiquement mis de côté.

En tant qu’Européen, on a parfois du mal à le comprendre, mais le locataire de la Maison-Blanche ne change pas le quotidien de ceux qui sont laissés pour compte. C’est juste un autre type qui prend la place du type qui était là avant.

Franck, le tire-au-flanc

Franck Gallagher est le personnage central de la série. Il ne travaille pas, vit de débrouilles et quand il est obligé de travailler, il fait en sorte d’avoir un accident du travail pour toucher des indemnités. C’est la caricature du père irresponsable, dont le foie est rongé par l’alcool et le cerveau, par toutes les drogues qu’il a prises ces trente dernières années.

Mais, il a un atout pour lui : il sait parler, ce qu’il fait qu’il se met les gens dans la poche, comme sa voisine Sheila, chez qui il va s’installer ou la directrice de l’école privée dans laquelle il veut inscrire gratuitement son fils.

Il a aussi l’intelligence de la vie. Il n’a pas terminé ses études, car il a croisé la route de Monica donc, il connaît toutes les combines possibles et imaginables. On détesterait l’avoir comme père ou comme voisin, mais on ne peut pas s’empêcher de prendre des notes devant ses trésors d’ingéniosité.

Fiona, la sœur courage

Fiona est l’aînée de la famille. Quand Monica s’est tirée, elle a dû arrêter l’école, alors qu’elle n’avait que seize ans, pour s’occuper de ses frères et de sa sœur. Elle cumule tous les boulots possibles, fait le ménage dans la maison, tient les comptes et quand c’est nécessaire, vire Franck de la maison.

Elle est plutôt malheureuse en amour, car, les types qu’elle croise ne comprennent pas pourquoi elle reste dans cette famille. Ils l’incitent tous à laisser le reste de la fratrie en plan. Sauf que Fiona ne le peut pas, d’abord moralement, puis légalement.

Elle essaie de prendre les meilleures décisions possibles, mais elle reste assez jeune et comme elle n’a eu personne pour la guider — ni père, ni mère, ni professeur — elle fait parfois des erreurs. Fiona quittera la série à la fin de la neuvième saison — la production a refusé d’augmenter Emmy Rossum — pour vivre une vie plus simple, mais elle aura quand même attendu que Lip prenne la suite.

Lip, l’intello sale gosse

Philippe, surnommé Lip, est le cerveau de la famille. Il a d’excellents résultats scolaires, mais il ne se voit pas d’avenir. Aller en faculté coûte très cher et dans une famille qui doit « bricoler » pour payer les factures de gaz, aller au MIT ou à Caltech équivaut à aller sur Mars.

Il finit par aller à la faculté. Malheureusement, sorti du cocon paradoxalement protecteur de la maison et des quartiers sud, il se perd un peu en chemin et tombe dans l’alcool. Il doit arrêter ses études en cours de route.

Son autre particularité est sa capacité à attirer les emmerdeuses. Il a un talent fou pour s’amouracher des nanas les plus délirantes possible, de Karen en passant par Mandy pour finalement s’installer avec Tammy, qui est bizarrement la plus équilibrée du lot. Lip deviendra le chef de famille après le départ de Fiona et réalisera l’ampleur de la tâche.

Ian, le cœur sensible

On découvre Ian, au moment où il réalise qu’il est homosexuel. En fait, dans sa famille, tout le monde l’avait compris sauf lui. Il essaie de sortir avec sa voisine Mandy, mais, c’est de son frère qu’il tombe amoureux : Mickey Milkovich. Excepté que chez les Milkovich, on est fièrement homophobe et néonazi.

Leur histoire va être compliquée, d’autant qu’Ian fait une autre découverte : comme sa mère Monica, il est bipolaire. D’abord attiré par l’armée, il suivra une formation pour être ambulancier. Comme sa sœur Fiona, il fera un détour par la case prison, ce qui rendra sa réinsertion un peu difficile que pour les autres.

Ian est le cœur de la famille et celui qui pardonnera presque toujours à Monica. Il est le mieux placé pour la comprendre, car il a les mêmes difficultés qu’elle.

Carl, le délinquant

Carl est le délinquant de la famille, qui fait quasiment toutes les bêtises possibles. À la différence de Fiona et d’Ian, il fera un détour par la case « centre de détention juvénile » et deviendra un petit caïd.
Comme Lip, il a un talent particulier pour attirer les nanas les plus toxiques. Au fil des épisodes, on se rend compte que Carl a tout de même un cœur et une éthique et de délinquant, il devient policier.

Curieusement, c’est assez logique. Après tout : qui mieux qu’un délinquant peut empêcher la délinquance ? Il est aussi celui qui connaît le mieux les rouages de la police et de la justice, comme lorsqu’il sort à des policiers « tirez pas ! Je suis blanc ! »

Debbie, celle qui voulait grandir trop vite

Debbie est encore une petite fille au début de la série, mais elle veut grandir et surtout grandir trop vite. Très rapidement, elle veut devenir mère, sauf qu’elle n’a même pas encore 15 ans. Comme on ne manque jamais de garçons pour tirer un coup, elle finit par en trouver qui va l’engrosser.

Fiona est catastrophée. D’une part, elle voit le cauchemar que ça va être d’avoir un autre bébé sur les bras et, elle aurait souhaité que sa sœur ne soit pas obligée d’arrêter l’école comme elle.

Debbie va garder son bébé et finira tout de même par trouver sa voie. Après le départ de Fiona, c’est elle qui tiendra les comptes de la famille et elle va découvrir que les choses sont moins simples qu’elle ne le croyait.

Liam, l’enfant très sage

Liam a une particularité dans la famille Gallagher. Il est le seul afro-américain. Il n’a pas été adopté, Monica n’a pas couché ailleurs – enfin si, mais Liam n’en est pas le résultat.

Au début de la série, il est un bébé donc, il n’est pas tout à fait un personnage important. Il grandit et se pose des questions. Toute sa famille est blanche, il est noir, que fait-il là ? Quelles sont ses racines ?

Comme Lip, il est très intelligent, mais contrairement aux autres membres de sa famille, il ne se met jamais dans des situations compliquées. Il fait tout pour éviter les ennuis. C’est d’ailleurs le seul de toute la famille qui arrive à éviter la case prison.

Kevin et Veronica, ceux qu’on aimerait avoir comme voisins

Si Kevin est un peu neuneu, il a la chance d’être en couple avec Veronica, qui est plus futée. Mais, ils ont un trait de caractère commun : ils ont la main sur le cœur.

Ce sont aussi d’excellents voisins, toujours prêts à aider et à écouter. On aimerait avoir de tels voisins.

En dépit des galères qu’ils affrontent, ils arrivent à garder le sourire, même quand leur femme Svetlana leur vole littéralement leur bar.

Le verdict

Shameless fait vraiment partie des séries qu’il faut voir. Une scène en particulier peut retenir l’attention. Fiona se rend à la banque pour demander un financement. Le banquier découvre qu’elle n’a jamais eu de compte donc aucune ligne de crédit. Il lui explique le système et à ce moment-là, on comprend que tout un monde s’ouvre à elle.

On aime aussi particulièrement une scène de mariage — on ne vous dira pas laquelle — qui est extrêmement drôle, surtout quand Kevin protège la cérémonie avec une batte de baseball.

La série fait onze saisons et chaque épisode commence par une engueulade du spectateur. Certains épisodes ont quelques longueurs, mais, comme la série est très réussie, on passe largement au-dessus de cela.

Par contre, les voit souvent aux toilettes ou en train de vomir ou en train de s’envoyer en l’air. Évitez de la regarder en mangeant si ce genre de choses vous gênent.

Les onze saisons sont disponibles sur Max.